La guerre en Méditerranée.
En 1492, la chute de Grenade
portait les Espagnols aux portes de l’Afrique et faisait désormais du
détroit de Gibraltar, la frontière méridionale de la péninsule
Jusqu'à
la fin du XVe siècle, la Méditerranée était demeurée un lac chrétien.
Les Espagnols œuvraient pour la
poursuite de leur Reconquista : Melilla tomba entre leurs mains dès
1497, Mers-el-Kébir en 1505, le Peñón de Vélez de la Gomera en 1508, Oran en
1509, Bougie et Tripoli, à l’autre extrémité de l’Afrique du Nord, l’année
suivante en 1510. Cette même année, face à la poussée espagnole, Alger et
Tunis préférèrent conclure un accord et se soumirent à la suzeraineté de
Ferdinand le Catholique. Et même si les Espagnols ne parvinrent pas, en
1510, à installer une garnison à Jerba (los Gelves), toute la rive
sud de la Méditerranée, était placée sous la domination de l’Espagne.
La
conquête turque signifie dans ce domaine une mutation fondamentale. Après la
prise de Rhodes, en 1522, et la reprise du Penon d'Alger par Barberousse, en
1529, 1a suprématie change de camp : « de 1534 à 1540 et 1545 une lutte
dramatique renversait la situation : les Turcs alliés aux corsaires
barbaresques, commandés par le plus illustre d'entre eux, Barberousse,
réussissaient à se saisir de la suprématie de presque toute la
Méditerranée... Ce fut un énorme événement » .
On
peut affirmer que le deuxième tiers du XVIe siècle en Méditerranée
appartient aux Turcs.
En
1538 les flottes italiennes firent un grand effort contre les Turcs. Le
pape, Venise et Gênes avaient uni leurs navires, encouragés trop mollement
par Charles Quint : ce fut le grave échec de La Frevesa (septembre 1538),
après quoi Venise conclut une paix séparée. Dès lors les Turcs et les
Barbaresques qui, en 1535, n'avaient pu empêcher Charles Quint de prendre
Tunis et d'y établir son allié, Moulay-Hassan, font la loi en Méditerranée.
En
1541, Charles Quint éprouve personnellement une grave défaite devant Alger
qu'il ne peut enlever. Pendant 25 ans les raids de 1a flotte turque
réussissent presque à tout coup. Fn 1543-1544, elle se permet d'hiverner à
Toulon après avoir pris Nice. En 1551, Tripoli, qui avait été prise par les
Espagnols en 1510 et confiée aux Chevaliers de Malte, est prise par les
Turcs; l'année suivante, ceux-ci razzient les côtes de Sicile et défont la
flotte d'Andrea Doria.
En
1553, ils prennent et pillent l'île d'Elbe. En 1554, les Algérois enlèvent
le Penon de Velez et en 1555 Bougie, supprimant ainsi deux importants
présides espagnols.
La course
exprimait à la fois l'incapacité de ces élites militaires à s'insérer dans
une économie de type commercial qui s'imposait alors partout en Méditerranée
et l'impossibilité du monde ottoman et barbaresque de mener des actions
militaires autres que la guérilla maritime. La course était donc une sorte
de guerre froide ponctuée d'escarmouches dans laquelle chacune des parties
s'emparait des biens et des hommes de l'autre. Ces biens devenaient alors
l'objet d'un intense négoce de revente et de redistribution dont les acteurs
les plus importants furent les Juifs de Livourne et leurs filiales
tunisiennes, anglaises ou hollandaises.
Placés
le long du littoral africain et conquis dans la foulée de la Reconquista,
les présides étaient apparus dès le début du XVIe siècle
,c’étaient généralement de petites cités ceintes de remparts, qui abritaient
une garnison chrétienne et un certain nombre de musulmans inféodés à la
couronne, mais qui étaient trop souvent coupées d’un arrière-pays avec
lequel les relations pouvaient être difficiles.
La maîtrise et le maintien
de ces points d’appui devaient constituer rapidement un enjeu stratégique
d’importance pour la maîtrise des espaces littoraux et maritimes.
De fait, par leur situation
centrale en Méditerranée, les présides de La Goulette et de Tripoli
contribuaient tout particulièrement à la défense des îles et des côtes
espagnoles ou italiennes, régulièrement razziées par les corsaires
barbaresques et menacées par l’avancée turque vers l’Occident chrétien dès
les premières années du règne de Charles Quint
Ces deux présides devaient
connaître une histoire mouvementée. Confié aux Hospitaliers de Saint-Jean
de Jérusalem, Tripoli
devait servir de base à la poursuite de la lutte espagnole par le biais de
chevaliers héritiers de l’idéologie des croisades. Quant à La Goulette,
bastion conservé jalousement par les Espagnols, son rôle consistait tout à
la fois à s’assurer de la vassalité des Hafsides, prêts à s’allier avec le
sultan, et à garantir un contrôle privilégié du port de Tunis en plein
développement. Bien que réticents à l’origine à accepter le fief de
Tripoli, les Hospitaliers s’occupèrent dès 1530 de transformer leur
préside en support militaire de leurs activités contre les musulmans et en
un véritable bastion chrétien.
Constituant des sociétés, avec des Européens, les Tripolitains jouaient
le rôle d'intermédiaires du commerce européen. Ils lui procuraient les
matières dont il avait besoin (plumes d'autruche, peaux, ivoire) et
assurait la distribution des produits de pacotille, des étoffes, des
armes etc. Depuis lors, les commerçants tripolitains étendirent leurs
activités "au Bournou, à Kanem, à Kano et dans les autres pays de
l'extrême Soudan".La république de Tripoli subsiste par son
commerce d'étoffes & par celui du safran qui se tire du mont Garian
situé au midi de la ville de Tripoli, & où il est admirable; mais
la principale richesse des habitants vient de leurs pirateries. Elles
furent si grandes dans le dernier siècle contre les François, que Louis
XIV. n'en put obtenir raison qu'en faisant bombarder la capitale par le
maréchal d'Estrée, vice - amiral. (D. J.)
http://revel.unice.fr/cmedi/document.html?id=39
Toutefois, l’installation de
l’Ordre à Tripoli ne put aboutir en 1550 et fut retardée régulièrement par
une certaine précipitation des événements. En 1547, le décès de
Barberousse laissait le champ libre à un nouvel acteur corsaire, Dragut,
dont la carrière fut tout aussi glorieuse et qui reprenait à son compte
les ambitions de Barberousse dans la reconquête des présides africains
L’histoire houleuse des présides
de Tripoli et de La Goulette, et tout particulièrement leur retour dans le
giron de l’Empire ottoman en 1551 pour le premier et en 1574 pour le
second, symbolisaient toute l’ambiguïté des conquêtes chrétiennes en
Afrique du Nord.
http://www.crlv.org/outils/encyclopedie/afficher.php?encyclopedie_id=101
http://revel.unice.fr/cmedi/document.html?id=840
voir ce site pour la suite importante de cette
conquête de la Méditerranée et de TRIPOLI et de LA GOULETTE
livre
Bibliothèque Municipale Arcachon Titre le XVI e Siècle /
BARTHOLOME BERNASSAR Professeur d'histoire Economique à L'université
de Toulouse ET JEAN JACQUART Maître de Conférence a l'Université
de Picardie / Armand Collin / Edition 1973 |