L'élevage peut être considéré comme l'un des premiers indices du
redressement économique. La prospérité de la Hollande semble due, dans une
large mesure, à son industrie laitière. La Lombardie devint une grande
région d'élevage de bovins, tandis qu'en Angleterre, les villages s'étant
dépeuplés à partir d'environ 1450, on commença à réserver et à clore un
plus grand nombre de terres pour y élever des moutons.
Dans beaucoup de régions d'Europe, la prospérité de la campagne
s'accrut avec le développement d'industries rurales ; celle du drap
produisit des tissus bon marché pour remplacer ceux qui étaient fabriqués
dans les villes et qui coûtaient si cher que les paysans ne pouvaient pas
les acheter. En Angleterre, son développement rapide fut favorisé, en
pleine période de dépression, par l'abondance de la laine et les
difficultés de l'industrie flamande, si bien qu'à la fin du XIVe siècle
l'Angleterre était l'un des principaux exportateurs de drap d'Europe.
L'industrie rurale présentait de nets avantages sur celle des
villes. Elle ne subissait pas les restrictions qu'imposaient les
corporations dans les villes et profitait de la mobilité accrue de la
main-d'oeuvre dans les campagnes. Il est possible aussi qu'elle ait tiré
quelques avantages de l'emploi de plus en plus répandu des moulins à
foulon.
Le succès des autres industries rurales ne fut pas aussi spectaculaire que
celui de l'industrie drapière en Angleterre. Néanmoins, une industrie
florissante du lin se développa dans la campagne de Flandre et, en Italie,
le travail des métaux s'effectua de plus en plus dans les montagnes où il
y avait de l'eau et du bois en abondance.
les banquiers italiens étaient avec les juifs les principales sources
d'argent en prêt et en lettres de changes
Les villes jouèrent un rôle essentiel dans la reconstruction de la
campagne. L'élevage exige plus de capitaux que la culture ; ce sont les
villes qui fournirent la plus grande partie des fonds nécessaires, comme
elles le firent aussi pour les cultures industrielles, en général à
proximité immédiate des villes. C'est en partie à cause du manque de
capitaux qu'en France l'agriculture resta si longtemps en sommeil.
L'accroissement des investissements en terre par les villes n'a peut-être
été qu'une réaction naturelle à la dépression économique, mais ce devait
être l'un des fondements du renouveau de l'agriculture.
Avec la régression du marché urbain les villes ne furent plus en
mesure de surexploiter la campagne. Les investissements avait dès lors des
chances d'être plus profitable a l'agriculture. Ce fut certainement le cas
de la Toscane ;les rentes perpétuelles en blé avaient été une lourde
charge pour la paysannerie mais elles lui rapportèrent au XVe siècle Les
gens des villes commencèrent à prendre une part plus directe dans
l'agriculture. Quand grands domaines ecclésiastiques de Lombardie .se
démembrèrent sous la pression de la fiscalité, une grande partie de leurs
terres fut acquise par des spéculateurs des villes qui, avaient les
capitaux nécessaires pour y faire: des améliorations. En même temps,
l'usage se répandit des baux de métayage de terre, aux termes desquels le
propriétaire était généralement tenu de fournir au locataire un peu de
capital ou du bétail. La répartition plus équitable des impôts entre la
ville et la campagne traduit peut-être l'intérêt accru que les cités
italiennes portaient a l'agriculture
Les grandes compagnies marchandes n'avaient pas encore commencé à se
spécialiser dans une branche d'affaires particulière mais touchaient à
presque tout, depuis la banque internationale jusqu'aux affaires purement
locales. Le marché des capitaux existait à peine en dehors de
participations au commerce maritime et dans les exploitations minières,
car l'industrie n'avait pas encore dépassé le stade artisanal et son
équipement exigeait peu de capitaux. La terre restait le seul réel
investissement à long terme.
En même temps, les fondations étaient mises en place pour un renouveau de
l'expansion commerciale. Le marché monétaire devenait plus souple avec les
progrès de la lettre de change, tandis que la nouvelle méthode de
comptabilité en partie double se révélait plus efficace pour
l'organisation des affaires. La recherche du profit existait certainement
déjà plus tôt au Moyen Age mais elle était maintenant mieux dirigée.
Le rôle croissant que l'État était amené à jouer dans la mise en forme de
l'économie est également préfiguré à la fin du Moyen Age. La ville était
déjà plus fermement intégrée dans le cadre de l'État. Les grandes cités
flamandes perdirent leur indépendance et passèrent sous le contrôle direct
des ducs de Bourgogne. Les gouvernements furent aussi contraints d'avoir
recours à des emprunts de plus en plus lourds, d'instituer des méthodes
plus efficaces d'imposition et même de dévaluer la monnaie pour payer
leurs dépenses toujours plus fortes. Les fondements économiques de l'État
étaient posés.
Le développement de l'État à la fin du Moyen Age alla de pair avec
l'apparition d'économies régionales mieux définies. Londres et Paris
finirent par dominer les économies de leurs pays respectifs en partie à
cause du rôle que chacune jouait comme capitale administrative. L'État
devait fortement contribuer dans l'avenir à rétablir l'équilibre si
souhaitable entre la ville et la campagne.
Livre Bibliothèque Municipale Arcachon Titre le XVI e Siècle /
BARTHOLOME BERNASSAR Professeur d'histoire Economique à l'université
de Toulouse et JEAN JACQUART Maître de Conférence a l'Université
de Picardie / Armand Collin / Edition 1973
Livre HISTOIRE
DU MOYEN AGE ET DE LA RENAISSANCE EDITIONS NATHAN BIBLIOTHEQUE MUNICIPALE DE
ARCACHON
R. Fossier, Le Moyen Âge, 3
vol. Paris, Armand Colin, 1982.