Les
progrès des échanges sont à la fois cause et conséquence des nouveaux moyens
techniques. Ils commandent l'accroissement de la production et
l'accumulation des capitaux.
Les
courants d'échanges intereuropéens ne sont pas substantiellement bouleversés
par les transformations économiques. Mais les volumes de marchandises
concernées croissent sensiblement.
Le
trafic méditerranéen se maintient, malgré une courte défaillance autour de
1515 (installation des Portugais à l'entrée de la mer Rouge, conquête de
l'Égypte par les Turcs, guerres en Méditerranée).
En
vérité, la Mer intérieure conserve son rôle d'intermédiaire entre l'Orient
(épices, corail, tissus précieux, coton de Chypre, blés turcs) et l'Occident
(draps, armes, pacotille, sel, bois). Les navires chrétiens, souvent
organisés en convois, partent de Marseille (en progrès constants de 1520 à
1570), des ports catalans, de Gênes, de Venise, de Raguse, vers
Constantinople ou les Échelles du Levant et d'Égypte.
Commerce
déficitaire pour l'Europe qui doit solder ses comptes par des envois de
métaux précieux. Le XVI e siècle voit également se développer le trafic avec
la Berbérie, malgré la piraterie. Les Espagnols puis les Français tentent
même d'installer des comptoirs fixes sur la côte. Les variations de la
politique turque, les exactions dont sont victimes les marchands occidentaux
dans les ports du Levant amènent les États à tenter d'organiser le trafic,
par l'obtention de privilèges (capitulations), par l'installation de consuls
chargés des intérêts des nationaux.
La
grande offensive turque en Méditerranée au milieu du siècle, l'organisation
de la riposte chrétienne qui aboutit à Lépante (1571) dérangent sensiblement
le commerce pour deux ou trois décennies.
L'affaiblissement
économique de l'Espagne, la disparition de la France déchirée par les
guerres ouvrent la mer intérieure aux ambitions des marins et des marchands
anglais et hollandais après 1590. Mais c'est au siècle suivant que cette
mutation profonde donne ses fruits.
LES FOIRES
Le
commerce de la façade atlantique ne cesse de croître en volume e en variété
tout au cours du siècle. Aux échanges traditionnels des pays du Nord et du
Midi, reposant sur les matières premières (laine espagnole, huiles et vins,
sel de la France de l'Ouest, vins de Bordelais), les produits fabriqués
(draps flamands ou anglais, toit es, métallurgie s'ajoutent, en quantités
croissantes, les produits d'outre-mer (épices, sucre, indigo) et les métaux
précieux.
Tout
un réseau de ports, de Cadix à Amsterdam, en passant par Lisbonne, Bordeaux,
Brouage, Rouen, Londres assure les relais de ce grand mouvement ,3e
marchandises. Le centre en est Anvers, qui assure sa primauté dans les
quinze premières années du siècle et la conserve jusqu'aux malheurs du temps
des troubles (blocage de l'Escaut par les révoltés, 1583; siège et pillage
par les troupes d'Alexandre Farnèse....
Les écus
castillans, les pistoles, les portugalles sont utilisées en France à l'égal
des écus, des testons, des francs d'argent.
Le XVI e
siècle a été marqué par un accroissement des frappes monétaires, par une
extension de la circulation des espèces, en particulier dans le monde rural
qui tend à s'intégrer à l'économie monétaire, par une lente dépréciation de
la monnaie de compte exprimée en poids de métal précieux (la livre tournois
équivaut à 17,96 gr d'argent fin en 1513, à 15,12 gr en 1550, à 11,79 gr en
1577, à 10,98 en 1602). Les efforts de stabilisation ont échoué, sauf dans
l'Angleterre d'Élisabeth.
Les
tendances inflationnistes, en multipliant les instruments de paiement ont
facilité les échanges, mais d'autres facteurs jouent en un sens négatif. Les
manipulations monétaires trop fréquentes sont un élément d'incertitude pour
les transactions à moyen terme.
Par
ailleurs, les variations de la valeur relative de l'or et de l'argent, d'un
pays à l'autre et d'une période à l'autre, entraînent des déséquilibres
constants et la fuite de la monnaie qui fait prime devant des espèces de
médiocre titre et de moindre valeur.
Malgré
l'accroissement général du stock monétaire, il semble bien que le gonflement
des besoins ait amené une insuffisance de fait, surtout dans la seconde
moitié du siècle (guerres, désordres, luxe). Ainsi est-on amené à frapper en
quantité croissante de mauvaises monnaies de cuivre tandis que l'or et
l'argent se cachent ou s'échangent à des cours très largement supérieurs aux
cours légaux.
La lourdeur
de la monnaie métallique, sa relative lenteur de circulation et son
insuffisance probable ont entraîné le développement d'autres instruments
d'échange reposant sur le crédit. Aux formes héritées de la période
précédente, le xvie siècle a donné une extension nouvelle et une plus grande
facilité d'utilisation.
L'instrument
le plus fréquent du crédit est la cédule, ou obligation.
Reconnaissance
de dette avec engagement de payer, soit à la demande, soit à terme, elle se
transforme par la négociabilité : un débiteur peut s'acquitter par la
cession de ses créances sur des tiers.
Cette
utilisation devient plus facile lorsque la loi autorise le premier créancier
à se retourner, en cas de non-paiement, vers le débiteur qui lui a remis les
cédules. La rente constituée peut aussi être un instrument de crédit: le
créateur de la rente reçoit un capital contre le versement régulier des
arrérages, mais il garde la possibilité de rembourser la somme pour éteindre
la rente, -:i a joué pour son détenteur le rôle de l'intérêt du capital.
Mais
l'instrument privilégié du crédit en matière de commerce international est
la lettre de change. Il s'agit d'une opération de prêt à terme, accompagnée
du passage de somme
due dans une autre monnaie à un cours fixé d'avance. Elle s'accompagne donc
d'une spéculation sur les changes. Depuis longtemps, l'ingéniosité des
hommes d'affaires a compliqué ce schéma pour permettre des profits plus
élevés Les lettres de change sont négociables
Livre Bibliothèque Municipale Arcachon Titre le XVI e Siècle /
BARTHOLOME BERNASSAR Professeur d'histoire Economique à l'université
de Toulouse et JEAN JACQUART Maître de Conférence a l'Université
de Picardie / Armand Collin / Edition 1973
Livre HISTOIRE
DU MOYEN AGE ET DE LA RENAISSANCE EDITIONS NATHAN BIBLIOTHEQUE MUNICIPALE DE
ARCACHON