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QUENTIN où je parle des foires
Paris, BnF, département des Manuscrits, Français 12559, fol. 167
Au
Moyen Âge, le commerce est la principale activité urbaine. Chaque ville
propose des boutiques et marchés, certaines accueillent en outre à dates
fixes des foires où se rencontrent les marchands ; ces manifestations
commerciales constituent le moyen le plus efficace pour assurer la
prospérité économique d'une ville. À l'origine grands marchés ruraux,
elles conservent longtemps ce caractère paysan, mais rapidement
s'ouvrent aux produits de luxe en provenance de toute l'Europe. Les
foires drainent alors des marchands de tous pays, devenant ainsi de
véritables centres d'échanges internationaux. Les plus fréquentées sont
celles de Brie et de Champagne.
L'enluminure représente une scène de foire dans une ville imaginaire.
Dans une vision idéale de la cité, sont réunies ses deux fonctions
principales, l'habitat et le commerce.
Le paysan qui apporte son grain ou le revendeur qui convoie en ville un
troupeau à livrer aux mazels sont des « marchands » ; pourtant,
lorsqu'on évoque ce type social, on pense à qui circule sur les routes ou
les fleuves, « pieds poudreux » porteurs de besace, ou conduisant un mulet,
plus riche négociant accompagnant à cheval une file de chariots. Ceux-là
vont ailleurs : vers la foire ; et ce haut lieu de la convivialité médiévale
doit retenir notre attention un moment.
Prévoir la rencontre de revendeurs offrant des produits d'origine lointaine,
non tant aux hommes de l'endroit qu'à d'autres revendeurs, est une forme du
« grand commerce » qu'on trouverait quasi en tous temps. L'Occident en a
cependant affiné le visage. Y a-t-il à l'origine de ces feriae, de
ces nundinae périodiques une souche religieuse, comme les fêtes de la
Saint-Jean pour le Lendit en face de l'abbaye de SaintDenis depuis le IXe
siècle au moins, ou celles de la Semaine sainte à Pavie ? S'agit-il
simplement d'une contingence géographique, point obligé de rupture de charge
comme les portus ou les wiks postcarolingiens de l'Europe mosane ou du nord,
ou carrefour d'itinéraires comme Chappes en Champagne, Visé, Thurout ou Huy
en pays belge ? Voire même d'une volonté princière accordant, dans une
arrière-pensée fiscale, des avantages aux marchands de passage, comme le duc
de Brabant ou l'évêque de Liège sur la voie mosane ? Parfois, on a la preuve
que cette volonté a forcé une géographie réticente : les tractoria ou les
conductus délivrés après 1137 par les comtes de Champagne aux marchands
désireux de gagner une ville-marché et qu'on faisait escorter d'hommes armés
ont pu déclencher ou encourager une convergence rien moins que prévisible.
Le 13e siècle est marqué par le développement du
monde urbain : les villes s'agrandissent, les métiers s'y organisent et
les habitants gagnent leur liberté.
Le système féodal se transforme : le pouvoir autrefois dispersé entre les
mains des seigneurs, se structure sous la forme d'une pyramide dont le
sommet est le roi. En France et en Angleterre se construisent de
véritables monarchies féodales, avec un roi puissant au-dessus de ses
seigneurs.
C'est dans ce monde pacifié et actif que se développent les
foires,l'art gothique et ses constructions audacieuses.
Le principe de la foire médiévale est d'organiser, hors de la ville, mais
sous sa responsabilité et sa « garde », un rassemblement d'hommes et de
marchandises pendant une longue durée, deux à cinq semaines, durant laquelle
la protection des biens et des opérations sera assurée. La réunion a lieu
sous des tentes, rarement sous des halles, à côté d'une « loge » ou d'un «
châtelet » qu'occupent les surveillants chargés au terme de la réunion, les
jours de l'« issue », de veiller à la reddition des comptes. Car durant tout
ce temps il y a exposition plus que vente, promesses de transactions
réciproques avant le « clearing » final. Que peu à peu les plus riches des
marchands aient obtenu d'avoir hôtel et caves en ville, ou inversement qu'en
interdisant la vente concurrente à l'étal de certains produits durant la
tenue de la foire le corps de ville ait entraîné les citadins à fréquenter
les nundinae n'étonnera pas. Pourtant rien de tout ce qui accompagne la
foire, proclamation ou «cri » de la valeur des monnaies dont on usera,
réglementation de la vente des boissons, examen de la qualité des produits,
ne s'est mis en place d'un coup ;longtemps la situation reste incertaine :
en 1127, à Bruges, à l'annonce de l'assassinat de Charles, comte de Flandre,
les marchands plient bagage et s'enfuient. Aussi la progression est lente et
s'accompagne parfois d'une spécialisation
la laine en Angleterre à Northampton, Winchester, Stamford, Saint-Yves,
Boston ; le drap en Flandre à Ypres, à Thurout, à Messines ; le bétail dans
le Languedoc ou l'Espagne, à Montpellier, à Medina del Campo ; les métaux à
Milan, à Francfort, à Novare, à Nuremberg ;les étoffes légères et la
quincaillerie à Saint-Denis, à Reims, à Pavie, à Saint-Gilles. Entre
l'apparition de la foire de Visé (982) et le début du XIIe siècle éclosent
ainsi des centres animés et inégalement fréquentés, car dans certains cas,
Metz, Toul, Liège, Verdun, Cologne, Gênes, entre 1010 et 1080, on a peine à
distinguer le marché urbain, de rivière ou de mer, d'une véritable foire.
Les affaires
sérieuses se traitent en ville: le marché couvert, situé en général au
centre, est ouvert aux paysans et aux artisans.
Le cas des foires de Champagne est exceptionnel : il l'est, je l'ai dit,
parce que le chemin entre Italie du nord et zone des mers froides serait
mieux inspiré de suivre le Rhin, ou de gagner la Saône soit par la Meuse
soit par l'Oise et l'Yonne, que de couper en travers d'une Champagne qui a
peu à offrir. On a des traces d'échanges à Provins dès 999, à Troyes en 1100
; a Saint Quentin ; mais les
Italiens qu'on rencontre au nord des Alpes, à Bruges en 1127, à Paris en
1140 viennent d'ailleurs et on n'en trouvera en Champagne régulièrement
qu'en 1170. A ce moment déjà les comtes ont, entre 1145 et 1160 dans
l'ensemble, favorisé l'ouverture de foires à Troyes, Provins, Lagny et
Bar-sur-Aube. L'originalité des réunions champenoises réside dans le fait
qu'au rythme de deux par an dans chaque ville, une « foire froide », une «
foire chaude », il s'établit sur une aire restreinte et régulièrement
protégée un cycle ininterrompu de rencontres. Ce phénomène nouveau devait
attirer, assez artificiellement, les itinéraires vers la Champagne sud et
sud-ouest, inciter les marchands d'origine lointaine à prévoir une
implantation fixe et régulière, facteurs, consuls, mais aussi granges à
réserves, peu à peu aussi à user sur place de procédés comptables plus
raffinés et moins aléatoires que le règlement en numéraire. Cette étape
n'est guère franchie par les Siennois, les Placentins ou les Catalans que
vers 1245-1270 ; mais on doit souligner le rôle moteur que les foires de
Champagne ont pu jouer par ce biais dans le commerce de l'argent.
En revanche, on a plus de mal à mesurer après 1200 l'effet des foires sur le
développement des marchés urbains traditionnels. La présence des grandes
réunions marchandes régulières, notamment dans les régions où la production
locale n'est pas négligeable, a certainement d'abord renforcé l'assise
fiscale du prince ou de la ville qui les accueillait : les taxes levées sur
les hommes et les choses, à l'occasion notamment du conduit de protection ou
de la garde durant la tenue de la foire, entraînèrent un blocage de
l'activité marchande sur la période fériale. En Italie se développe même le
divieto, c'est-à-dire l'interdiction au moins formelle d'exporter les
produits de la fabrication locale sur le contado pendant la foire. Il
est donc probable que beaucoup de marchés urbains d'origine plus modeste se
sont hissés à un niveau de foire, fût-ce à l'intérieur des murs de la ville,
tout en s'isolant par une palissade ou quelque autre moyen, comme à Liège.
Dès lors la multiplication en ville même de loges ou de fundaco,
réservés à tel ou tel groupe étranger, tend à modifier le tissu urbain : à
l'extrême
concerne les marchands allemand: die la Hanse. à Londres :::rune à Venise,
mais d'autres aussi en des lieux aussi divers que Lubeck, Genève. Douai,
Barcelone, Lerida, Montpellier, Metz, voire dans les villes de Champagne
elles-mêmes. Troyes ou Provins.
L'émergence du marchand
C'est un topo usé mais indéracinable que celui de la « bourgeoisie montante
», dont on note l'interminable ascension, chez les Grecs comme au XIXe
siècle. En revanche, le personnage du marchand professionnel est une figure
peu discernable dans l'Antiquité et très caractéristique, au contraire, du
Moyen Age ; c'est le marchand intégré à la société locale, élément de la
cité, rouage permanent de l'économie, et non pas le syrius du VIIe
siècle, le mercator errant du IXe ni même le « pied poudreux » du
colporteur déraciné qu'on persécute ou exploite. Ce type social est le
premier que l'on voit, certes, avant l'essor principal du XIe siècle et pour
deux raisons : d'abord parce que le commerce lointain est réduit dans son
volume ou sa clientèle (cuirs de Cordoue, soie d'Orient, verreries tchèques,
parfums, pourpre) et que c'est à cette catégorie modeste mais très attendue
qu'ont alors affaire les grands.
Ensuite parce que ces étrangers, même si on
leur donne de l'amicus, comme le fait en 1021 le comte de Bergame,
sont sans défense et qu'on peut les menacer, les spolier, les expulser sans
trop de risques, comme le font les évêques ou archevêques de Turin, de
Crémone, de Cambrai, de Worms, de Cologne entre 900 et 1010. Il subsistera
toujours ce petit groupe d'étrangers sans racine solide, même lointaine.
Après 1150 on n'en parlera plus guère ; à Gênes le dernier « étranger » qui
trafique, un Syrien, Ribaldo di Saraphia, meurt en 1175.
A cette date, il y a plus de cent ans que le type social du marchand urbain
s'est dégagé. Des agents de l'évêque ou du comte à l'origine, ou des
facteurs implantés en
ville des grands seigneurs ruraux, notamment ecclésiastiques ?
primordial.
Beaucoup sont implantés dans les quartiers neufs des villes, ces burgi
qui se développent au-delà des murailles après 1010-1040, voire sur des
sites neufs, portus ouwiks de l'Europe du nord.
Mais leurs
caractéristiques principales sont d'abord d'être les premiers portés à se
regrouper, à s'associer, sans doute parce qu'ils se savent plus que d'autres
menacés dans leurs activités. Les premières associations, non exclusivement
pieuses, dont nous ayons la trace écrite les concernent :« carités »,
fratemae, « keures », compagna en Europe du nord-ouest ou
en Italie, à Tiel, Saint-Omer, Aire, Cologne, Wurtzbourg, Londres,
Barcelone, Gênes, Venise, Plaisance entre 1027 et 1090. A ce niveau, il ne
s'agit certes que de secours mutuels. Mais les formations à dimension
économique sont contemporaines. Qu'il s'agisse d'un emprunt à l'Islam -
douteux cependant avant 1100 -, ou plutôt d'une imitation de pratiques
byzantines, c'est dès 950-980 à Venise, assez nettement plus tard en Toscane
ou même en Italie méridionale et en Sicile normande, que se développent des
contrats d'association où interviennent les intérêts de plusieurs marchands
: rogata, simple accord, peut-être même verbal, d'entraide réciproque
à l'occasion de voyages en commun, fratema ou societas, qui gardent
un parfum familial mais consistent en la mise en commun des efforts et de
l'argent, colleganza et commanda plus précises qui établissent la
proportion due aux participants lors du partage des bénéfices (ou des
pertes), soit au prorata des capitaux apportés, soit en fonction des risques
courus.
Généralement, l'un
des associés, celui qui n'a pu qu'apporter un pécule modeste, affrontera les
périls, l'autre, commanditaire principal, reste sur place, mais encaissera
deux tiers ou trois quarts des gains. Contrat ? Peut-être, mais
l'armement d'un navire ou l'équipement d'une « route » de mulets est un
investissement considérable ; sa perte est un risque énorme qui légitime de
gras bénéfices de sécurité. Inversement, un petit possesseur végéterait en
salarié s'il ne pouvait entrer dans un tel système.
Un nouveau pas peut d'ailleurs être franchi. Dès 1109 à Venise, 1143 à
Gênes, les socierates maris deviennent des « compagnies », en reprenant un
terme déjà ancien qui désignait les groupements chargés d'équiper une flotte
chaque année, ainsi à Gênes dès 1090.
Cette fois le contrat, qui a une
dimension familiale et une durée fixe (un à six ans, renouvelable au reste),
consiste à battre le rappel du capital de base, le corpo familial, chaque
participant, chaque consors étant solidairement responsable de l'entreprise,
armement, course, etc. Mais il est fait en outre appel à un sopracorpo,
apports individuels d'« actionnaires » qui prennent une part, un locum, dans
l'entreprise et percevront un revenu sur les gains, qui se tient
généralement entre 8 et 12 % , placement assez avantageux, supérieur au
revenu moyen du capital foncier, égal à la perception d'une dîme, laquelle
n'est pas à la disposition de quiconque.
Ces pratiques ont mis longtemps à
gagner l'Europe du nord ; on leur a préféré l'entraide à l'étranger et le
secours mutuel dans la ville d'origine : les « ghildes » saxonnes et
normandes où l'on entre en payant (geld, l'argent, est l'étymologie probable
de ce mot scandinave), puis les « hanses » germaniques et romanes du
continent ne dépassent pas le stade des confréries profanes avec cotisation,
banquet, caisse commune, consuls prenant en charge le sort d'un membre,
dimension morale de charité réciproque, contrôle des marchés et du monopole
de vente. Encore ne les voit-on se développer à Londres, Lincoln, Winches
Livre Bibliothèque Municipale Arcachon Titre le XVI e Siècle /
BARTHOLOME BERNASSAR Professeur d'histoire Economique à l'université
de Toulouse et JEAN JACQUART Maître de Conférence a l'Université
de Picardie / Armand Collin / Edition 1973
Livre HISTOIRE
DU MOYEN AGE ET DE LA RENAISSANCE EDITIONS NATHAN BIBLIOTHEQUE MUNICIPALE DE
ARCACHON
Le troisième jour avant les calendes de juin, c'est-à-dire avant le
premier juin, tombe le 30 mai, alors que dans notre façon de calculer du 30
mai au 1er juin, il y a deux jours et non
trois ! C'est tout comme les
nundinae, qui sont des « semaines » de huit
jours dans notre façon de calculer, mais de neuf
jours, d'où le mot nundinae, pour les Romains.
Si triduum – mot à mot « espace de trois
jours » – en fait réellement deux pour nous, les Romains ont donc
naturellement compris quarto quoque anno comme un
intervalle réel de trois ans, ce qui donnait des années bissextiles tous les
trois ans au lieu de tous les quatre ans. Et pourtant les pontifes, comme la
plupart des gens un peu érudits de l'époque, savaient bien qu'une année
valait 365 jours ....... VOIR LE SITE TRES INTERESSANT
Fait défenses à
tous Marchands négocians, leurs facteurs, & généralement à toutes personnes,
de faire débaler en cette ville de Paris pendant trois mois, aucunes
marchandises de laines, fil, étoupes, cottons, & fourrures, sans la
permission du Lieutenant de Police, si elles viennent par terre ; & de les
tirer des batteaux, si elles sont venuës par eau, sans la permission du
Prevost des Marchands, & Eschevins de cette Ville, à peine d’estre les
marchandises brulées, & de deux milles livres d’amende contre les
proprietaires, & de plus grande peine, s’il y échet, tant contre eux que
contre les Voituriers. Et pour éviter que l’on ne puisse apporter aucunes
marchandises de laines, fourrures, fil, cotton, & étoupes des lieux infectez
du mal contagieux en changeant de routes (A CAUSE DE LA
PESTE ).....A
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